Quinze années se sont écoulées depuis notre périple itinérant sur le sentier côtier de Belle-Ile en Mer. Depuis, l’endurance et la vaillance ont légèrement faibli. Nous avons donc envisagé de parcourir cette île de toute beauté par des randonnées en étoile à partir du Palais. Pour la facilité du stationnement et la proximité, nous  embarquons au port de Vannes sur le Gwenn a Du (drapeau de la Bretagne) appartenant à la compagnie maritime Navix. La vedette descend le goulet de Port Anna, puis entreprend la traversée du Golfe du Morbihan à vitesse réduite, aidée par le courant de jusant. Nous voyons défiler, tour à tour, les îles de Boëd et sa petite chapelle, Les Logoden, l’île aux Moines, Er Lannic et ses menhirs immergés, Gavrinis et son tumulus avant d’aborder à la cale de Port-Navalo pour accueillir le reste des passagers. Nous sortons du Golfe et le capitaine met le cap sur Belle-Ile. Le vent de nordet faible à modéré n’a pas levé de clapot. Le tangage et le roulis ne se font aucunement sentir. A l’approche de la pointe ouest de Houat, le bateau ralentit, et chacun peut ainsi admirer un groupe de dauphins s’ébattant le long de la coque. Après deux heures de navigation, nous accostons dans le port du Palais. Nous déposons nos sacs de voyage à la bagagerie située sur le quai  Jacques Le Blanc afin de pouvoir prendre le bus pour le bourg de Sauzon.
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La petite chapelle de l'ïle de Boëd                                                                Arrivée en vue de Port Navalo

Communes : Sauzon - Le Palais
Distance : 12,5 km
Dénivelé : + 244 m -288 m

Nous empruntons la passerelle pour rejoindre la gare routière située au dessus du bassin à flot. La ligne 1 nous amène près du port et du camping de Sauzon. Le GR de pays commence au pied de l’arrêt de bus. Nous contournons toute la ria, par un sentier en balcon, au milieu d’une végétation touffue. Après la traversée du pont qui enjambe le vallon, nous passons sur l’autre versant. Nous pouvons admirer les maisons colorées du bourg, l’entrée du port surmontée de tourelles lumineuses vertes et rouges. Le sentier bifurque vers l’est en direction du Palais. Les premiers vallonnements nous rappellent que le sentier côtier de Belle-Ile n’est pas une balade pépère. Martine regrette amèrement de ne pas avoir emporté ses bâtons de marche. Les premières criques s’incrustent entre les falaises couvertes d’ajoncs en fleurs. L’eau cristalline paresseuse vient s’abandonner sur le sable fin. Martine ne résiste à l’appel de la baignade. A la plage de Port Jean, tandis que je patauge dans dix centimètres d’une eau glaciale, Martine nage, insensible à la froidure de l’élément liquide. Le temps d’une pause sous un soleil radieux, nous reprenons notre route.
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Port de Sauzon                                                                                             Crique

A Port Fouquet, nous apercevons les premiers éléments vaubanesques qui ont fortifié une partie de l’île en vue d’un possible débarquement anglais au XVIIIéme. Nous avons en point de mire le sémaphore de la pointe de Taillefer qui surveille l’étendue marine entre l’île et le continent. Nous passons au-dessus de la plage de Castoul, très prisée par les gens du Palais. Nous cheminons le long des murailles de la citadelle avant de rejoindre le port. Nous récupérons nos bagages et nous nous installons à la terrasse de la crêperie « La Chaloupe » en attendant notre logeuse Arlette Valin pour nous conduire à sa chambre d’hôtes située sur la route de Bangor, à 1.7 km du centre-ville. Nous dînons à La Chaloupe après avoir parcouru la distance ci-dessus mentionnée, en traversant les fortifications au travers de voûtes réservées aux piétons et aux cyclistes.
Donnant Lespoulains

Commune : Sauzon (Donnant –Les Poulains)
Distance : 16 km
Dénivelé : +251 m -262 m

Les trois lignes de bus partent de la gare routière à 9h30. Nous avons avancé l’heure du petit déjeuner pour nous permettre de prendre le bus de la ligne 2 qui nous déposera au village de Donnant. Après un bon kilomètre d’asphalte, nous débouchons sur la fameuse plage réputée pour son spot de surf. Malheureusement les quelques adeptes de cette discipline ne trouvent pas aujourd’hui de quoi assouvir leur passion. En effet la mer est très calme, et les rares rouleaux ne permettent pas de surfer. Nous traversons la plage avant de rejoindre le sentier situé en haut de la falaise. Les différentes échancrures dans la côte : Port Skeul, Porh Puns, Poh Lézonet, se succèdent rendant le parcours sportif par des descentes et des montées bien raides. Nous longeons la côte sauvage de l’île, très découpée et soumise aux assauts des vagues déferlantes lors des tempêtes venant de l’ouest. Le site de l’Apothicairerie, jadis mémorable, a été rendu à la nature et l’accès à la grotte interdit. Plus au nord, nous découvrons les anses de Ster Ouen et de Ster Vras où de nombreux voiliers sont venus jeter l’ancre.
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Par temps calme, ce havre permet un mouillage en toute sécurité et dans un décor de carte postale. Nous faisons halte sur la plage de Ster Vras le temps de goûter à la tiédeur du sable fin et pour Martine à la froideur de l’océan. En remontant sur l’autre versant nous longeons le golf de Belle-Ile avec ses greens, ses fanions, ses bunkers au milieu d’une nature soi-disant préservée. A l’approche du fortin de Sarah Bernhardt, un des bancs en demi-lune, implanté par la tragédienne pour admirer le superbe chaos des tempêtes et les irrésistibles couchers de soleil, nous offre un moment de contemplation. Nous clôturons cette randonnée par le tour de la pointe des Poulains, en visitant l’exposition mise en place par le conservatoire du littoral dans le petit phare. Le bus de la ligne 1 nous ramène à la gare routière. Ce soir, nous dînons à « La table de Corto » sur une terrasse découverte à l’étage, avec vue sur le clocher de l’église et le son des cloches. C’est un endroit convivial, au rapport qualité-prix très satisfaisant.
Donnant Lespoulains

Communes : Bangor (Herlin) - Locmaria
Distance : 15 km
Dénivelé : + 322 m -325 m

A la gare routière, le bus de la ligne 3 nous attend pour un arrêt sur la départementale 25 au lieu-dit Herlin. Nous rejoignons et traversons le village susnommé puis empruntons un chemin non viabilisé en direction de la plage du Baluden. Du haut de la falaise, le sentier domine la petite plage. Nous poursuivons vers la pointe Saint Marc, cette fois-ci dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, face au soleil, et dans le sens privilégié par de nombreux randonneurs. Au petit havre de Pouldon, un pêcheur circule sur l’estran avec sa brouette pour amener un casier à crustacés vers son petit canot. A chacun sa débrouille.
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Pêcheur au casier                                                                                          Falaises de la côte sauvage

La végétation est luxuriante. Les ajoncs jaunissent les parois des tombants rocheux. Devant nos pas, un nombre impressionnant de lézards communs et de lézards verts s’enfuient à toute vitesse pour se réfugier dans les buissons. Quelques secteurs pentus où le sentier zigzague nous font penser à un franchissement de col de moyenne montagne. En contournant la pointe du Skeul, la côte s’oriente à l’est. La végétation devient plus exotique : plantes grasses, griffes de sorcières. A la plage de Port-Maria, la plus proche du bourg, Martine retente une cryothérapie à l’eau de mer, avec succès. Une fois réchauffée et séchée, nous grimpons vers le bourg. Nous récupérons le bus, près de la mairie. Ce soir, nous dînons au « Verre à pied ». Notre coup de cœur du séjour.
Herlin Locmaria

Communes : Bangor (Hervarigeon) – Sauzon (Port-Coton)
Distance : 14 km
Dénivelé : + 244 m -288 m

Pour cette dernière journée, notre logeuse se propose de nous amener nos bagages au départ du bateau. Un grand soulagement qui nous évite un portage fastidieux jusqu’à la Bagagerie. Nous l’en remercions chaudement. A 9h30 précises, nous quittons la gare routière en direction du village de Kervarigeon. Le bus nous dépose sur la route principale à un kilomètre du village. Au centre du village, un chemin d’exploitation nous amène au dessus de la plage d’Herlin. Nous prenons un petit sentier fraîchement fauché qui descend vers la vaste étendue sableuse. Puis nous reprenons de l’altitude ; de la côte niveau zéro de l’eau, nous gravissons 50 mètres de dénivelé. Ensuite le GR 340 chemine en surplomb de petites criques sableuses, de grottes façonnées par la houle et d’Îlots. Puis nous abordons le port de Kérel. A marée basse, l’eau se retire loin du haut de plage. Martine n’est pas sensible au charme de cette crique encaissée, à l’abri des vents dominants. Pourtant elle est un terrain de jeux idéal pour les jeunes enfants qui peuvent se baigner dans une eau peu profonde et souvent plus chaude.
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Le sentier s’avère assez physique, les vallonnements se succèdent. Les craves à bec rouge viennent nous narguer avec leur chant strident. Je sens la fatigue dans les jambes, mon équilibre devient instable dans les montées. Nous avons le sémaphore du Talut en point de mire. A son pied, nous trouvons le site idéal pour pique-niquer, sur une pelouse rase et souple, avec vue sur les îles de Domois. Un panorama époustouflant. Un goéland argenté nous tient compagnie dans l’espoir d’un peu de nourriture. Repus, nous poursuivons vers Port Goulphar. La ria est dominée par l’hôtel de standing « Le Castel Clara » et sa thalassothérapie. Notre périple du jour s’achève aux aiguilles de Port Coton. Ce site a été immortalisé par Claude Monet au travers de ses toiles impressionnistes (les pyramides et le rocher du Lion) en 1886. Nous laissons la beauté de ces roches dentelées pour rejoindre le port du Palais, récupérer nos bagages et entreprendre le voyage retour sous un soleil ardent vers le port de Vannes.
Keravigeon Port Coton

 

Tour de Belle-Ile en Mer : 2010

Le Palais - Sauzon - Les Poulains -Sauzon
Distance : 23km
Dénivelé : +940 m -930 m

Je survole le ferry qui a quitté  Port Maria à Quiberon, sur une mer peu agitée. Je distingue, de mon œil perçant, les passagers qui se rendent au port du Palais. A l’arrivée, quatre d’entre eux, sac au dos, passent la porte poterne et longent les hautes murailles de la citadelle Vauban. Je les observe, en vol stabilisé, prendre le sentier du littoral, en direction de Sauzon.
Ils suivent la côte nord-est, fortement entaillée par de nombreux petits vallons : Port Fouquet, Port Jean, Port Poyet, Port Blanc, au milieu des ajoncs et de l’aubépine en fleurs.
Je plane, profitant de la légère brise, tandis qu’ils peinent dans les raidillons.

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Mais je les perds de vue lorsqu’ils font halte à Sauzon. Je survole l’Escale, là où la plupart des randonneurs s’arrêtent pour manger et se coucher.
Je m’apprête à prendre de l’altitude lorsqu’ils ressortent, sans leurs sacs. Ils se dirigent vers le sentier côtier en direction de mon lieu de prédilection : la pointe des poulains où je trouve ma pitance dans les forts courants de marée.

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Lorsque le conservatoire du littoral a réaménagé le site, nous, les goélands, avons retrouvé un peu de quiétude au bord des falaises.
D’un glissement d’aile, je poursuis mon tour d’observation. Après avoir contourné le musée de l’illustre comédienne Sarah Bernard, ils passent entre les greens, les fairways et les rough du golf de Sauzon avant de descendre vers l’anse de Ster-Vras. Je les quitte tandis qu’ils remontent vers le bourg, pour aller retrouver ma colonie qui niche à la pointe du Château.

Sauzon -Bangor
Distance : 25 km
Dénivelé : +900 m -890 m

"Chant du coucou, temps doux". Coucou, coucou.
Ils viennent de Ster-Vras, et vont vers le sud-ouest, en passant par Ster-Ouen. Je les surveille de loin, car sur cette lande rase, je ne trouve pas d’abri sûr pour me poser ou pour me cacher. Ils s’écartent de la pointe du Château, car mes cousins de la gente ailée marine sont en pleine période de nidification.
Je poursuis, de battements d’ailes réguliers, les marcheurs qui découvrent les lieux emblématiques de la côte sauvage, la grotte de l’apothicairerie, la plage de Donnant, les aiguilles de Port Coton. Je les traque, d’autant plus facilement que le sentier reste en surplomb des à-pics rocheux.
Je me pose sur la rambarde du phare de Goulphar et j’embrasse ainsi toute cette partie du littoral. Mais je les perds de vue lorsqu’ils descendent dans la crique de Port Goulphar où sont amarrés de petits canots de pêche.
A tire d’aile, je file vers le sémaphore du Talut. La végétation arbustive, dans les vallons, devient plus abondante, Je virevolte entre les tamaris, les ajoncs et l’aubépine.
Sur la plage de Kérel, propice à la baignade, je me perche sur les ganivelles qui protègent la dune de l’érosion.

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Ils viennent vers moi, puis s’éloignent vers le nord par une sente pentue jusqu’au hameau de Kernest. Je suis dans mon élément, car ils rejoignent le bourg de Bangor, à travers bois, le long d’un vallon encaissé.
Depuis que nous sommes entrés dans le bourg, plus de ce « coucou, coucou » incessant. Le centre d’accueil nous héberge dans des chambres individuelles, propres, confortables et agréables.
Nous profitons d’un soleil généreux pour boire un verre à la terrasse du café avant d’aller mettre les pieds sous la table.

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Bangor - Locmaria
Distance : 23 km
Dénivelé : +900 m -890 m

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La cloche de l’église de Bangor sonne la demi-heure de sept heures et l’ouverture du dépôt de pain à la supérette. Du pain frais pour le petit déjeuner pour partir du bon pied. Une heure plus tard, nous redescendons vers la plage de Kérel par le vallon de Bordenech.
Quel tapage ! De si bon matin, on foule déjà ma prairie. Quels sont ces intrus qui marchent à la queue leu leu, le verbe bien haut et le pas décidé ? Curieux et craintif de nature, je m’en vais les suivre, de fourrés en galeries souterraines.
La lande et les pinèdes me permettent de suivre le cheminement de nos joyeux compagnons le long du haut plateau, laissant l’île de Bangor à leur droite, et de petites plages difficilement accessibles. A peine le temps de me dégourdir les pattes, qu’au bout de huit kilomètres, ils font une pause casse-croûte sur la magnifique plage d’Herlin. Avec ce temps anticyclonique, un petit clapotis vient s’échouer sur le sable fin. Et pourtant, j’en ai vu des rouleaux, par mer forte, s’engouffrer dans le goulet.
Je cours, je bondis pour atteindre le haut du sentier pentu. Essoufflés, ils arrivent, pour quelques centaines de mètres plus loin, redescendre dans la crique de Baluden. Je vis au milieu de ces montagnes russes dans un décor liquide,  végétal et minéral époustouflant.
Après ces passages éprouvants pour leurs mollets, je reste en retrait car le sol est dénudé et rocailleux et n’assure plus aucune cachette. Avec mes longues oreilles, je ne passe pas inaperçu. Et pourtant, j’aimerais longer la pointe du Skeul, où le panorama est impressionnant. J’attendrais le petit jour ou la tombée de la nuit pour m’y aventurer.
Je retourne à mon terrier tandis que mes compagnons bipèdes poursuivent vers la pointe d’Arzic.

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La côte s’adoucit peu à peu, le paysage est moins austère, la végétation est luxuriante.
Dans une échancrure profonde de la côte, nous posons nos sacs sur la plage de Locmaria. Certaines courageuses n’hésitent pas à se jeter dans une eau glaciale.
Nous rejoignons le gîte communal intégré dans le terrain de camping. Nous dînerons aux Ajoncs d’or, pour un rapport qualité-prix très correct.

Locmaria-Le Palais
Distance : 18 km
Dénivelé : +680 m -740 m

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Après avoir attendu l’ouverture de la supérette pour refaire le plein de victuailles, nous retournons vers la plage de Port Maria pour aborder le versant nord du vallon. Au delà de la plage de Port Andro, le sentier vire à l’ouest. Plus d’horizon infini, place aux îles d’Houat et d’Hoëdic, au phare de la Teignouse, à la chaussée des Béniguets et à la presqu’île de Quiberon.
Je cours plus que je ne vole à travers les prairies qui descendent en pente douce vers les plages de sable blanc. Ceux qui m’observent finissent par franchir les portes des fortifications qui protégeaient l’île des envahisseurs et par fouler le sable fin des plages qui s’étirent entre la pointe de Kerdonis et Le Palais.
De mon plumage coloré, je traverse nonchalamment talus et clairière, contourne les différents fortins, devenus propriétés privées et qui barrent le sentier côtier. La chasse étant fermée, je n’ai plus aucune raison de me cacher. Je les suis, puis je les perds de vue car, tantôt ils cheminent sur l’estran, tantôt ils marchent le long des pâtures où paissent les agneaux et leurs mères.

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A Port-Gwenn, ils se séparent, les uns se dirigent vers le
gîte d’étape, les autres vers Le Palais.
Nous terminons notre périple de quatre jours avec deux autres randonneurs, venus de la région parisienne, que nous avions côtoyés au gîte de Sauzon. Il aura fallu attendre la veille au soir pour faire plus ample connaissance et parcourir la dernière étape ensemble.